Le progrès de l’intelligence artificielle ces dernières années est vraiment impressionnant. Nous sommes de plus en plus inondés par des nouvelles technologies et de nouveaux outils d’IA, comme ceux qui génèrent des images, des musiques, des présentations Powerpoint etc. En outre, Chatgpt est de plus en plus utilisé et d’autres systèmes d’IA liés au langage font également leur apparition, comme ceux de Google et WhatsApp.
Dans ce monde en constant changement nous nous demandons quelles seront les implications de ces technologies dans nos vies quotidiennes et comment seront les métiers de demain. Étant donné que j’étudie les langues et la linguistique, il me semble logique de réfléchir à ces changements (ou possibles changements) dans ce domaine. Comment apprendrons-nous des langues ? Comment traduirons-nous des textes ? Quel sera l’impact de l’IA sur la recherche de nouvelles langues ou de langues en voie de disparition ? Peut-on mettre l’IA au service de l’éducation ? Et, pour finir, je me demande souvent ces derniers jours : "l’intelligence artificielle est-elle vraiment intelligente ?". Ce ne sont que quelques questions que nous pouvons nous poser en ce moment. Je voudrais préciser que mon objectif n’est pas de répondre à ces questions (je ne serais même pas capable de le faire), mais de nous permettre de réfléchir et de nous interroger sur ce sujet si nouveau, qui peut aussi bien nous effrayer que nous émerveiller.
Tout d’abord, un sujet au cœur des débats est celui sur la place de langues ‘minoritaires’ dans la numérisation du langage. Certains nous disent qu’il serait possible d’envisager la revitalisation des langues autochtones à l’aide de l’Intelligence artificielle. D’un autre côté, la plupart des logiciels ne prennent pas de langues africaines et les ignorent complètement. Selon l'ingénieure Omolabake Adenle, la technologie du langage est vraiment très importante car nous avons plusieures langues en voie d’extinction et, également, d’autre langues qui fleurissent en ce moment, la technologie est importante pour ne pas laisser ces langues à l’écart du marché numérique. Sinon on pourrait vivre une sorte de ghettoïsation technologique des langues africaines, où elles seraient exclues de cette évolution numérique que nous vivons.
Alors, quelles seront les conséquences éthiques et sociales de l’intelligence artificielle basée sur le langage ? L'IA repose avant tout sur une logique d’économie du temps. Or, selon le philosophe Marc Crépon, notre rapport au langage ne devrait pas être guidé par cette quête d’efficacité, car il ne s’agit pas d’un processus à accélérer, mais du temps même de la vie humaine.
L’usage de la langue par les être humains, ou notre faculté du langage, repose sur des malentendus, des jeux de mots, des ambiguïtés; autant d'éléments qui vont contre le “désir” de l’IA, qui tend à tout formater, programmer et de ne pas laisser de la place à l'incertitude. Pourtant, en tant qu'êtres humains, toutes nos relations sont fondées sur le langage, sur notre rapport à la langue, et sur sa part d’imprévu.
Lorsque nous réfléchissons au langage humain et à notre rapport à lui, à l'ère des avancées technologiques de l’IA, nous devons nous interroger si nous voulons vraiment l'existence d’un modèle technologique, d’un ordinateur capable de tout comprendre et de tout reproduire. Quelle est alors l'expérience affective et quels sont les sentiments que nous exprimons à travers le langage ? Une machine serait-elle capable de les reproduire ? Ne serait-il pas dangereux de programmer et de prédéterminer notre rapport au langage ?
La linguiste Stefanie Ullmann s’interroge sur la manière dont l’IA pourrait transformer notre usage du langage. Nous pouvons considérer au sein de langues un déni d’existence d’usage formaté, car elles se réinventent tout le temps, et façonnent leur propre singularité. L'ironie, le sarcasme, les métaphores,font partie intégrante de notre langue et contribuent à rendre le langage humain unique parmi d’autres formes de langage, et jusqu’à présent les machines ne sont pas capables de les produire.
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